Madagascar en pleine tourmente : le président dissout le Parlement, refuse la démissio
Antananarivo (Konomaguinee.com) — Une crise politique sans précédent secoue Madagascar depuis ce mardi 14 octobre 2025. Sous pression d’une contestation populaire et d’une mutinerie militaire, le président Andry Rajoelina a pris une décision radicale : dissoudre l’Assemblée nationale et exclure toute possibilité de démission.
1. Contexte et montée de la contestation
Depuis fin septembre, des manifestations massives, principalement menées par la jeunesse (souvent qualifiée de “Gen Z”), secouent Antananarivo et d’autres villes de Madagascar. À l’origine, les protestations portent sur des coupures d’eau et d’électricité chroniques, des difficultés ambientales, et un fort mécontentement social.
Progressivement, ces revendications d’ordre matériel ont glissé vers des appels plus explicites à la démission du président, accusé de corruption, de mauvaise gestion et de ne pas répondre aux urgences vitales du pays.
Un tournant a été atteint lorsque l’unité d’élite militaire CAPSAT a officiellement rejoint les manifestants, déclarant qu’elle “refuse de tirer” sur la population.
Les parlementaires de l’opposition évoquaient une procédure d’impeachment (motion pour “abandon de poste”) à l’encontre du président, qu’ils jugeaient absent de ses fonctions.
2. Le geste de défi : dissolution du Parlement
Dans la matinée du 14 octobre, un décret présidentiel révèle la dissolution de l’Assemblée nationale, selon l’article 60 de la Constitution.
Le texte, diffusé via les médias de la présidence (notamment sur Facebook), affirme que “le choix s’impose pour rétablir l’ordre” et “renforcer la démocratie”.
Cette manoeuvre intervient juste avant le vote programmé de l’impeachment, ce qui est perçu comme une manœuvre pour bloquer les procédures visant sa destitution.
De plus, la veille, Rajoelina avait formellement exclu toute démission, en appelant au respect de la Constitution.
3. Le président en “retraite sécurisée” : où est Rajoelina ?
Au moment de ce décret, le président est introuvable publiquement. Dans un message adressé à la nation depuis un lieu non précisé, il a déclaré s’être réfugié dans un “espace sûr” par souci de sa sécurité, évoquant des tentatives d’assassinat.
Des rumeurs ont circulé sur une extraction discrète via un avion militaire français, bien que Paris nie formellement tout engagement.
Malgré son absence, le président continue à se présenter en garant de l’ordre constitutionnel et rejette la légitimité d’une sortie par la démission.
4. Réactions et contestations de légalité
L’opposition, immédiatement, a dénoncé la dissolution comme illégale : selon eux, le président n’a pas respecté les procédures constitutionnelles (aucune consultation valide du président de l’Assemblée n’aurait été faite).
Malgré le geste solennel de dissolution, les manifestants dans les rues ne semblent pas intimidés. À Antananarivo, des foules continuent de se rassembler, exigeant la démission pure et simple de l’exécutif.
Selon une évolution récente rapportée par Reuters, l’Assemblée a néanmoins voté massivement la mise en accusation du président — 130 voix pour, une seule abstention — malgré le décret de dissolution.
Sur le plan constitutionnel, la dissolution entraîne une échéance pour des élections législatives dans les 60 à 90 jours selon la loi malagasy.
5. Scénarios possibles et enjeux pour Madagascar
a) Escalade militaire ou confrontation
Avec l’armée et les unités d’élite (notamment CAPSAT) largement impliquées, un affrontement armé ou un “coup de force” demeure un risque concret. Le basculement des forces de sécurité vers l’opposition affaiblit sérieusement le contrôle du président.
b) Transition imposée
Une issue pacifique pourrait être une transition technique, où un gouvernement de transition prendrait le relais jusqu’aux élections, pour apaiser les tensions. Mais cela suppose un compromis entre forces politiques, militaires et la rue.
c) Résistance prolongée
Rajoelina pourrait tenter de tenir tête, s’accrocher au pouvoir depuis l’ombre, en comptant sur des soutiens extérieurs ou des divisions dans l’opposition — un scénario dangereux pour la stabilité du pays.
d) Intervention internationale
Certains observateurs craignent que la France, ancien pouvoir colonial avec des liens nombreux à Madagascar, soit amenée à jouer un rôle discret ou ouvert. Cela pourrait renforcer les accusations de néocolonialisme.
6. Message aux lecteurs de Konomaguinee.com
Madagascar est à un tournant. Une nation historiquement fragile, déjà marquée par des putschs et instabilités, fait face aujourd’hui à l’une de ses crises les plus intenses. La jeunesse — porteuse d’espoir — exige un changement radical. Le président, au contraire, mise sur la rupture institutionnelle pour survivre politiquement.
Pour la Guinée, pour le continent, cet épisode rappelle que la démocratie est fragile quand les dirigeants perdent légitimité. Le soutien aux aspirations démocratiques, la vigilance diplomatique, mais aussi la non-ingérence seront fondamentaux dans les semaines qui viennent.
Je suivrai de près l’évolution et vous proposerai des analyses, des interviews et des éclairages pour comprendre les bouleversements à Madagascar — et les leçons à retenir pour toute l’Afrique.
Source Africaguinee.com
Reportage Abou Anelka Diakite 624 83 80 97
